Contre pose ou contre posture du Yoga

Contre posture ?

Présente dans beaucoup de cours et enseignée par beaucoup, elle se nomme Pratikriyasana, mais aucun texte n'en parle…

La pratique des postures travaille sur AnnamayaKosha, le corps physique et sur PranamayaKosha, le corps de l'énergie. Ce travail est en premier physique et permet de redonner la potentialité à des articulations, des tendons, des muscles et des organes dans le corps physique. En portant son attention sur les énergies (Nadis, Adharas, chakras), la posture permet de prendre conscience du corps d'énergie, de le développer, de l'affiner.

Pour que ce travail ait lieu, il faut donner du temps au temps. Garder une posture, assez de temps pour que l'empreinte se fasse.  Si vous souhaitez faire bouillir de l'eau et donc faire changer d'état l'eau, vous devez laisser la casserole longtemps sur le feu. Sous le feu de la posture, il est difficile de percevoir finement ce qu'il se passe… Pour cela, on prend une posture en respectant tout un chemin précis. Puis, on tient la posture et on en sort, comme on y est entré, pour rester en assise un long moment afin de continuer à percevoir en nous les transformations subtiles qui ont eu lieu. Cela permet de mettre en lumière l'architecture énergétique et de rencontrer, d'expérimenter les centres, les nadis et les adharas !

La contre-posture va effacer une grande partie de ce qui s'est installé pendant la posture et il nous sera plus possible de percevoir la profondeur des postures, les secrets des postures…

Beaucoup de styles de pratique du Yoga glissent d'une posture à une autre dans une détente agréable et positive pour vivre un état de calme et de paix déjà bien supérieur à ceux qu'on peut rarement rencontrer dans notre vie. Dans ces styles, la contre-posture est présente. Cela permet à des millions de personnes de vivre un « yoga de surface » et c'est déjà bien mieux que de prendre des médicaments pour aller bien ! Tant qu'on pratique avec cette idée que "nous" faisons une posture, nous n'irons pas plus loin que nous, avec ce grand danger de renforcer notre ego dans la pratique par le côté jubilatoire de la posture et de tomber dans : "regardez comme mon corps est beau et souple".

Le « yoga moderne » a aseptisé la portée mystique et profonde du Yoga.

Le Yoga moderne, axé sur le corps, le dynamisme, la vigueur du corps et la thérapie au Yogi Krishnamacharya père spirituel de Desikashar, Iyengar, Pattabhi Jois, Van Lysebeth… Tous ont développé la même recherche et la même idée, faire du Yoga quelque chose d'accessible au plus grand nombre et une thérapie corporelle. Une pratique vraiment accès sur la la posture, le bien-être, la paix, le calme. Une pratique qui, souvent, dissocie les asanas et le pranayama, parfois qui met de côté complètement le Pranayama. Dans l'une des écoles de yoga que j'ai suivie, rattachée à Desikashar, on ne faisait pas beaucoup de pranayama et une grande règle était de ne pas dépasser plus de 12 souffles en kapalabathi au risque de se griller les nadis…

Pendant un temps, vous aimerez les postures et les efforts dans la pratique du Yoga. Puis certainement un jour, vous aurez envie d'aller un peu plus loin et d'approcher le Yoga intérieur. Le Yoga intérieur, défini par Madhya Lakshya, la maitrise du mental… Celle qui va permettre à un individu de devenir un maître de l'intention et de l'énergie. Derrière chaque posture se cache un secret à trouver et à expérimenter.

La posture est une "caricature", un linga qui permet de nous connecter à des archétypes, des subtilités. Le Hatha Yoga cherche l'éveil de Kundalini en unissant en nous la lune et le soleil (Ida et Pingala). Pour que cela se passe en nous, nous devons découvrir et travailler sur notre corps d'énergie et petit petit accepter sa transformation. Ainsi une séance de Hatha Yoga n'est plus là pour nous faire vivre le calme et la paix, mais pour transcender notre corps et le faire muter vers un corps "glorifié", où l'énergie circule librement et peu prendre toutes les formes et les expérimentées directement en apportant connaissances et pouvoirs, les deux axes du développement spirituel.

Une posture nous permet de vivre et d'expérimenter à chaque fois un nouveau monde, celui de la terre, celui de l'eau, celui de la terre combinée avec l'eau ou de l'air avec le feu… Tous les éléments ne s'assemblent pas harmonieusement entre eux et n'apportent pas les mêmes résultats.
Certaines postures permettent de travailler sur des archétypes comme des animaux et on rejoint ici la vision des chamanes et des animaux totems, il y a aussi les postures de thérapies, de forces, de pouvoirs.
Par exemple, la posture du cadavre (chavasana) permet de vivre des états profonds de conscience modifiée et d'atteindre le voyage mystique ou de découvrir le non-souffle ou encore de s'enfoncer dans un lieu où formes "humaines" et temps ont cessé et d'expérimenter ce que nous sommes sans le corps…

YSP : 49 Après avoir assimilé la posture, on en vient au contrôle du souffle qui consiste à arrêter les mouvements d'inspiration et d'expiration.

Autre exemple : Dans Kurmasana la tortue.
En expirant, le souffle descend dans les pieds, se coupe en deux et longe les jambes pour revenir à mulhadara. En inspirant, le souffle monte dans ajna et c'est un massage interne qui allonge la colonne vertébrale. À un moment, je laisse toutes les tensions disparaitre, plus aucune tension musculaire, relâchement total et je tente de m'endormir dans la posture, souvent en bas à vide. La sensation psychologique est unique, ce sont mes sens qui entrent en moi et le monde extérieur disparait quand je prends la posture. Je me retrouve dans mon monde, dans ma coquille, au fond de moi, dans… Allez voir !!!
Puis sur l'inspire quand je quitte la posture, le monde extérieur revient…
On ne peut vivre cela avec autant d'intensité que dans cette posture.

Chaque posture est unique et permet de vivre un archétype, un pan de la création, un univers total.

Il n'y a rien entre Bhujangasana (le cobra) et Sarvangasana (la chandelle), pas les mêmes postures, pas les mêmes centres touchés, pas du tout les mêmes sensations psychologiques, spirituelles. C'est le grand secret des postures. La séance ne se prépare pas, elle obéit au silence et aux énergies présentes. Alors l'idée d'une posture "reine" n'a aucun sens dans la vision du Yoga.

Chaque posture est totale, rien à rajouter ou à enlever par rapport à une autre posture ou technique, on la prend, on la garde (longtemps !!!). On revient et on laisse la trace disparaitre dans une assise qui nous permet de vivre la posture pendant encore longtemps immobile. Une fois l'énergie mise en place, elle garde une forte inertie. Sortie de la contrainte physique de la posture, elle va se révéler à nous dans la posture assise neutre. Alors, on revient de la posture comme on l'a prise, puis une fois dans la posture assise, on ne bouge plus, même si on sent des tiraillements, ils font partie de toute la structure.
S'il y a des idées ou des mouvements mentaux, on peut utiliser le mantra HamSa et suivre la respiration dans la colonne vertébrale qui monte à l'inspire et descend à l'expire. La conscience va suivre l'énergie, si tout est calme, et aller dans ce lieu mis en lumière par la posture pour s'identifier au lieu qui vibre et rayonne. Par identification, on perçoit le lieu. Si l'énergie est forte, résultante de la posture, du pranayama et de la concentration, le souffle cessera dans le lieu et la subjugation sur le lieu sera puissante…

C'est l'explication de la 3ème partie des Yoga Sutra de Patanjali : III

De la puissance du Yoga. Puis l'énergie redevient, neutre et chaotique, alors il est temps d'entrer dans un nouveau monde !
Il devient ainsi impensable qu'une posture puisse être amplifiée par une autre. Car il convient d'entrer dans un état dans lequel la forme, les traces psychologiques, les sentiments, l'idée de ce que nous sommes, la conceptualisation de notre personnage aient totalement disparus.
Cela pour laisser apparaitre en nous de nouvelles formes et les expérimenter avec la plus grande neutralité.
Chemin faisant, le pratiquant perd de plus en plus sa forme « humaine » et son esprit s'ouvre avec les énergies fortes que les postures proposent.

Le passage d'une forme à une autre permet au Yogi de découvrir toute la création en lui, de se libérer de toutes ses formes et de toutes ses traces. Il remonte à la source en éveillant ses énergies qui révèleront Sa Conscience.
Dans ce niveau de pratique, il devient logique que la contre-posture n'a plus aucun sens, qu'elle n'a plus à enlever quelque chose de négatif ou de contrer quoi que ce soit, puisque tout ce qui est à vivre ne peut être que positif.
C'est bien la profondeur qui est recherchée. Le pratiquant est entré dans le Yoga avec comme idée fondamentale, celle de ne plus considérer la pratique du Yoga comme quelque chose de nocif pour son corps ou son esprit dans toutes les techniques.
S'il n'a pas cette conviction très forte, il ne pourra pas avancer sur le chemin et prendre les risques réels que le chemin réserve à ceux qui s'y aventurent et deviennent ainsi de « véritables » Yogi.

 

 

Bonne Pratique !

 

On en parle ici : Forum sur l'idée de la contre pose.

 

 

 

 

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